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ENCORE UN PEU DE PATIENCE!

LES NEWS SONT EN ROUTE!

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Une pétition pour l'égalité salariale

15-12-2015  - avatar

Force est de constater que le nouveau Conseil fédéral ne montre pas l’exemple en matière de représentation homme/femme et reste en retrait en matière d’égalité salariale. Sa proposition, actuellement en...

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Ailleurs

Annick Blavier, une œuvre engagée

27-06-2017 Hélène Upjohn - avatar Hélène Upjohn

Il y a du mystère dans les collages d’Annick Blavier, les déchirures, les fragments, les situations que l’on ne voit pas en entier, les citations qui ont perdu leur auteur.e..Pourtant...

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Genre&Féminismes

Une pilule pour doper la libido féminine…

10-12-2015  - avatar

Les sociétés pharmaceutiques rivalisent d'ardeur pour mettre sur le marché une pilule qui stimulerait le désir sexuel chez les femmes. Sprout Pharmaceuticals a déjà obtenu le feu vert pour la...

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chronique féminista-voyageuse

Réveille-toi et innove !

 

Cet été, l'auteure a séjourné pendant plusieurs semaines à Kigali, capitale du Rwanda, dans le but de réaliser un reportage sur le thème des femmes entrepreneures. Partie avec son anti-moustique et son carnet de notes pour seuls bagages, Joëlle Rebetez nous propose en exclusivité une série de chroniques rédigées sous la forme d’anecdotes à la fois drôles et sincères et surtout, plusieurs portraits de femmes rencontrées au cours de son séjour. Elle nous parle aussi de féminisme ou, selon ses propres termes, d'un «féminisme de terrain» qu'elle a choisi d'expérimenter à travers le voyage, loin des contextes familiers.

Des doutes et un abonnement de fitness
Nous sommes le 27 juillet 2014, je franchis le portail de sécurité de l’Hôtel Serena, quartier de Nyarugenge, centre-ville de Kigali, Rwanda. Le vaste lobby de l'entrée est le théâtre des allées et venues incessantes des employé-e-s de l'hôtel, des hommes et des femmes d’affaires ainsi que des touristes de passage. Je m’installe au coin d’une table sur la terrasse qui surplombe la piscine extérieure, sors l’ordinateur coincé au fond de mon sac à dos et demande au serveur le code wifi. Je pense alors au projet qui m’a amenée au cœur du continent africain, dans ce tout petit pays, tellement petit qu’on ne le distingue plus lorsqu’on le pointe du doigt sur une carte géographique… Un peu comme la Suisse, d’ailleurs. Mais la surface du «Pays des mille collines» est encore plus restreinte, 26'000 km2 pour une population s’approchant des 12 millions d’habitant-e-s.

Ce séjour au Rwanda est en préparation depuis plusieurs mois. A l’origine, l’envie de partir à la découverte d’un pays en pleine reconstruction, 20 ans exactement après les événements de 1994. L’envie aussi de se lancer sur les traces de femmes entrepreneures et d’en faire un sujet de reportage. Un reportage sur les femmes, réalisé par une femme. Mettre en lumière le parcours de «femmes modèles» ; je parle ici de celles qui travaillent du matin au soir pour s’en sortir, qui créent, qui innovent par passion, et souvent par nécessité. Des femmes de courage ayant, au lendemain du génocide, lancé un atelier de couture, fondé une clinique médicale au centre-ville de Kigali, repris les rênes d’un village de campagne au sud de la ville Butare ou encore appris à conduire un taxi-moto, métier habituellement exercé par des hommes. Fatuma, Pétronille, Speciose, Vestine et bien d’autres, dont les portraits et les destins entrepreneuriaux seront dévoilés au fil de cette série de chroniques, me permettront de restituer, à travers une perspective strictement féminine, quelques images du Rwanda, tel qu’il se présente aujourd’hui. La promotion des femmes est, paraît-il, l’une des priorités de la politique gouvernementale. Un gouvernement conduit d’une main de fer par Paul Kagamé qui, en véritable CEO à la tête d’une vaste entreprise, veut transformer le Rwanda d'ici 2020 en hub économique et financier pour toute la région de l’Afrique centrale. 

Lorsque je commande ce jour-là mon premier «African tea» - thé noir accompagné d’un nuage de lait et d’une pointe de gingembre - les contours de mon projet sont encore flous, pour ne pas dire inexistants. Et pour être tout à fait franche, je n’ai en poche que les coordonnées de deux ou trois personnes, glanées au hasard de mes recherches sur le net et auprès d'une amie suisso-rwandaise – «Tu verras, des femmes entrepreneures, on en trouve à tous les coins de rue» m'a-t-elle confié juste avant mon départ. Ce travail, je dois donc l’imaginer et le mettre en œuvre de A à Z. Comment m’y prendre ? Où trouver des cheffes d’entreprise ? Comment les aborder et les convaincre de m’accorder un entretien ? Face à tant de questions qui ne peuvent trouver immédiatement réponse, j’établis un plan d’action en trois points : a) parler du sujet de mon reportage à toutes les personnes qui croiseront mon chemin, b) imprimer des cartes de visite et les disperser aux quatre vents et enfin c) trouver un club de fitness pour conjurer mes angoisses du moment et m’assurer au moins un rendez-vous fixe par jour !

L’abonnement de fitness, je peux le conclure directement à l’hôtel Serena pour la modique somme de… 250 USD, un luxe sans commune mesure. Mais si je dois rentrer bredouille en Suisse, j'aurai quand même pu m'accorder un peu d’exercice quotidien. Je ne sais alors pas encore que ce fitness se révélera très vite un point de départ essentiel pour la réalisation de mon reportage. En effet, j'y rencontrerai plusieurs personnes-ressources qui n'hésiteront pas à m’ouvrir leur carnet d'adresses. Quant aux cartes de visite, elles sont, à Kigali encore plus qu’ailleurs, indispensables pour avoir ses entrées…

Urambona Ikigali !*

*Traduction en français du Kinyarwanda : Kigali, me voici !

Photo,  Vue sur Kigali. Le quartier d'affaires se développe au cœur de la ville, © Joëlle Rebetez - 2014

Question de classe

Stratégies d'apprentissage N°2.

À trente ans et presque toutes mes dents, je continue de me former au métier de plombier-chauffagiste...
Immersion en entreprise, pause de 10 heures :
 –    Ça doit pas être facile pour vous, cette ambiance «ouvrière»...
Mais de quoi parle-t-il ?
 –    En tous cas, s'ils vous embêtent, faut m'en parler.
Et ça recommence... Le premier à m'avoir tenu ce discours était mon formateur. Le suivant, le responsable de mon centre d'apprentissage. Et voilà que c'est au tour de mon boss... Diplômés, intellos, cadres, blancs, entre 40 et 50 ans ou la combinaison de tout ça. Des types en position de pouvoir, méprisants au possible envers ces soi-disant «ouvriers attardés-machos-un-peu-bronzés».
 –    En tous cas, s'ils vous embêtent, faut m'en parler, hein.
Il a dit ça bien fort, devant une dizaine de collègues. Alors cette fois, je réponds du tac au tac : «Ouh là ! J'ai rencontré bien plus de machisme chez les profs et les patrons que chez mes collègues... Vous feriez mieux de balayer devant votre porte». Le chef d'atelier ne relève pas... et une semaine plus tard, je suis toujours en poste. Je m'imagine alors que ça va peut-être devenir plus facile.

Mais dix jours plus tard, je ne m'en sors plus si bien. Un de mes collègues m'a dans le collimateur. Alors que je l'évite consciencieusement, il ne perd pas une occasion de me critiquer, de me lancer des reproches cinglants. Je ne sais pas ce qu'il s'est mis en tête, attirance ou aversion, mais il est agressif sans raisons apparentes, je le mets hors de lui par ma seule présence. J'ai essayé de riposter une fois ou deux en lui renvoyant ses vannes en boomerang, comme le font les autres types de l'atelier, humour l'air de rien, sans me démonter. Mais ça n'a fait qu’augmenter la tension : il me regarde de plus en plus méchamment. Un sentiment d'insécurité qui monte. Jusque-là, j'avais attendu que la plupart des collègues se soient changés pour entrer à mon tour dans le vestiaire et me déshabiller. Mais j'ai peur de me retrouver seule face à lui, alors je m'engouffre dans le vestiaire en même temps que les autres. Regards goguenards : mon casier est tout au fond du vestiaire et je dois donc passer devant toute la troupe qui glousse à mon passage. Double allée de regards en coin et de remarques ambiguës. Deux fois par jour, la même épreuve du vestiaire. Un autre matin, un autre soir, encore un matin, et après deux semaines de ce petit jeu, je suis vraiment épuisée. Les relations se sont tendues avec plusieurs types qui n'ont pas aimé que je ne sourie pas à leur blagues. Je monte demander au chef si je peux me changer dans une autre pièce ou si, au moins, je peux obtenir un casier à l'entrée du vestiaire pour échapper à la double haie d'honneur jusqu'au fond de la pièce. Il me répond qu'il va voir ce qu'il peut faire. Et quelques jours plus tard, convocation dans son bureau :
 –    J'ai réfléchi pour la situation du vestiaire. Vous êtes la seule femme ici, alors je crois qu'on ne va rien pouvoir faire...
 –    Mais justement...
 –    Oui justement, vous comprenez, si vous étiez plusieurs, on pourrait envisager deux vestiaires, mais là... Ce serait vous donner un statut particulier, faire de vous une chose à part. Je pense que ce n'est pas bien pour votre intégration dans l'équipe. On ne peut rien faire de plus. Faut vous durcir... ou bien accepter que ce boulot n'est pas pour vous.
Je n'ai pas le temps de protester qu'il poursuit :
 –    Mais j'ai quand même pensé à vous !
Et, tout fier, il me montre une affiche qu'il vient d'imprimer, affiche de sensibilisation contre les violences faites aux femmes... en Argentine. Il l'agite en souriant devant mes yeux, puis la remet, soigneusement, au fond d'un tiroir. Je suis abasourdie, mais cette fois pas plus de quelques secondes (à force d'entraînement, je commence à  réfléchir plus vite) :
 –    Ah, c'est vraiment gentil ! Mais pourquoi me montrer ça ?
 –    Parce que ça concerne la Femme ! Et vous êtes la Femme de notre boîte, ce n'est pas rien. J'espère que vous comprenez qu'on vous respecte.
… Vous savez quoi ? C'est vous qui êtes concerné, pas moi. Elle est pour vous cette affiche. Pour votre fils, vos collègues et pour l'équipe de direction.
Je sors du bureau en trombe. Si je trouve des alliés, ce sera du côté des ouvriers.

Photo DR