Du sang et pas de larmes à BlackMovie
Il n'est pas si loin le bon vieux temps où le cinéma de terreur essayait de séduire le public féminin. On peut remonter à l'an de grâce 1998 (grand cru cinématographique au demeurant) et au film japonais Ring pour noter une volonté originale de vouloir faire peur aux adolescentes dans les salles obscures. A cette époque, dans l'empire nippon, la technique est déjà rodée. Le phénomène vient en effet de la littérature (Ring est adapté du roman éponyme) où les éditeurs se sont rendus compte que les jeunes filles étaient loin d'être insensibles aux frissons. Entre romans de gare et mangas, les sujets horrifiques se concentrent alors autour de personnages de femmes. Mais pas de Lara Croft pour autant : journaliste entre 30 et 40 ans, souvent divorcée, l'héroïne a un CV quasi banal. Mais c'est justement l'irruption de l'horreur dans le banal qui suscite la peur.
Sommet du genre, sans surprise, conçu par les créateurs (réalisateur, scénariste, producteur et auteur du roman original) de Ring, Dark Water a aussi marqué le glas de cette heureuse période. Depuis, les femmes d'action sont revenues dominer le cinéma fantastique et la terreur se conjugue aux cruautés soaps à la Saw. Pas surprenant alors de découvrir, durant le festival BlackMovie (du 17 au 26 février), que le film dit « de genre » soit envahi par le cinéma pop-corn déjanté. On découvrira donc Tokyo Gore Police, farce saignante avec Eihi Shiino, la star sadique d'Audition et surtout Helldriver, amusant délire avec zombies au look très bande dessinée. C'est ce dernier film qui pourrait bien symboliser la jonction entre l'horreur clinique de Dark Water et les délires excentriques d'un Takashi Miike ou d'un Quentin Tarantino. Désormais, ce n'est plus en affrontant et en extériorisant ses traumas que l'on triomphe du mal (voire du mâle), mais en résolvant un classique complexe d'Oedipe dont, au demeurant, le cinéma use et abuse depuis sa création. Pour la pure terreur, on attendra une prochaine révolution.