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Tu vois le genre?

Martine Chaponnière et Silvia Ricci Lempen ont choisi d'écrire ensemble un ouvrage essentiel parce qu'il va plus loin que ce qu'on peut lire habituellement: il ne s'agit pas d'un bilan sur le féminisme ni d'un coup de gueule sur la énième injustice ou violence subie par les femmes. Non, les auteures ont mis les mains dans le cambouis et on démonté les mécanismes avec des mots simples pour que tout le monde puisse comprendre un peu mieux comment tourne le monde. Tu vois le genre? a été commandité par la Fondation Emilie Gourd pour répondre à cette nécessité de vulgariser des concepts qui restent encore trop souvent l'apanage des universitaires. l'émiliE aussi a voulu en savoir plus. Interview.

 

 

l'émiliE : Comment vous est venue l'idée de faire ce livre ? Pourquoi ensemble ?

M. Chaponnière et S. Ricci : Par un beau soir d'été, nous dînions toutes les deux sur une terrasse. L'idée avait germé dans la tête de Silvia d'écrire un livre de vulgarisation sur les théories féministes développées par le nouveau mouvement depuis les années 1970. Mais elle ne voulait pas le faire seule, d'où sa proposition qu'on l'écrive ensemble. «Les théories féministes sont parfois tellement compliquées que les gens n'y comprennent plus rien !» disait-elle. Ce livre est donc le fruit de ce projet un peu fou de remettre à plat la notion de «féminisme» dans un langage qui puisse parler aux femmes et aux hommes d'aujourd'hui. Nous avons proposé à la Fondation Emilie Gourd, dont nous sommes toutes les deux membres du Conseil, de publier cet ouvrage pour célébrer le centième anniversaire de la naissance du journal fondé en 1912 par Emilie Gourd : Le Mouvement Féministe, devenu par la suite Femmes suisses puis, en 2000, l'émiliE. Bien que n'ayant jamais fait cet exercice ensemble, nous savions d'instinct que, pour nous deux, l'écriture à quatre mains ne poserait pas de problème, et ce fut effectivement le cas.

Pourriez-vous présenter brièvement cet ouvrage ?

Ce livre se propose de montrer les enjeux théoriques développés par le nouveau mouvement féministe. Comment celui-ci a-t-il revisité les notions, plus compliquées qu'elles n'en ont l'air, d'égalité et de différence ? Et, à partir de là, comment la recherche féministe a-t-elle fait évoluer les savoirs dans les domaines de la politique et du travail, par exemple ? Mais nous abordons aussi les nouvelles problématiques développées par le mouvement féministe comme celles de l'imbrication des différentes oppressions que vivent les femmes d'une manière différente de celle des hommes (race, classe, âge, orientation sexuelle, etc.). Ce que nous essayons de montrer, c'est que la théorie féministe est loin d'être unitaire (il suffit pour s'en convaincre d'évoquer les affaires du foulard islamique), mais que ses développements contribuent de manière certaine à l'avancement du savoir.

Qu'en attendez-vous ?

La plupart des gens – et parmi eux beaucoup d'intellectuel-le-s – pensent que la cause des femmes est une affaire réglée. Nous tentons de montrer quatre choses :

- la «cause des femmes» n'est pas encore une affaire réglée
- les théories féministes, si elles peuvent apparaître compliquées, peuvent être comprises par la plupart des gens à condition que, comme toute théorie, quelques personnes s'attellent à les rendre déchiffrables
- les chercheuses et chercheurs académiques enfermés dans leur tour d'ivoire ont besoin de traducteurs-trices
- on ne peut plus parler du féminisme, il faut parler des différentes approches féministes qui s'opposent parfois.

C'est ce que nous avons tenté de faire. Par-dessus tout, nous espérons que notre livre contribuera à enrichir les débats parfois mal informés autour des questions concernant les rapports humains entre femmes et hommes, les rapports entre femmes et les rapports entre hommes.

Qu'avez-vous appris, découvert en y travaillant?

Enormément de choses! Nous savions déjà que les théories féministes contemporaines étaient très diverses, mais l'écriture de ce livre nous a amenées à nous plonger en profondeur dans les argumentations des unes et des autres et à mieux comprendre certains concepts à première vue paradoxaux, et souvent contradictoires entre eux. Par exemple, comment les féministes matérialistes peuvent nier toute influence de la biologie sur la construction du système patriarcal; ou comment les adeptes du queer peuvent soutenir que cette théorie n'équivaut pas à une dépolitisation du féminisme, alors même que qu'elles ne reconnaissent pas l'existence des femmes comme catégorie politique. Nous avons dû faire l'effort d'essayer d'entrer dans la tête des autres.

Cela a-t-il changé votre regard sur les féminismes? Sur nos sociétés?

Oui, cela nous a aidées à remettre en question un certain nombre de certitudes. Soit des certitudes que nous partagions  toutes les deux – car notre vision du féminisme plonge ses racines dans un même terreau, celui du féminisme occidental blanc au sein duquel nous avons toutes les deux milité; soit des certitudes qui étaient propres seulement à l'une ou à l'autre d'entre nous, et que ce travail nous a amenées à confronter.

En somme, nous nous sommes rendu compte à la fois de la nécessité d'élargir notre champ de vision commun, en y incluant notamment le vécu de femmes très différentes de nous par leur histoire, leur culture d'origine et leur situation sociale; et de la nécessité de creuser nos propres divergences mutuelles. Nous sortons de ce travail de rédaction avec un sentiment d'anxiété face à la rapidité et au caractère parfois chaotique des mutations de la pensée qui se produisent autour de nous et ailleurs sur la planète; mais aussi avec le sentiment gratifiant d'avoir fait un travail de défrichage utile pour celles et ceux à qui il incombe de construire l'avenir. 

INFO: vous pouvez imprimer le coupon-réponse ci-dessous et commander directement ce livre auprès de l'éditeur ou de votre libraire

 

COUPON-REPONSE

Martine Chaponnière & Silvia Ricci Lempen, Tu vois le genre ? Débats féministes contemporains
14,5 x 21 cm – 224 pages – 2012 – ISBN 978-2-8290-0439-1 – CHF 28 / € 19 + port

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