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Anorexie: les garçons s'y mettent aussi.

Nouvelle tendance parmi les ados : les garçons s’affament pour avoir une silhouette filiforme. Questions

 

C’est au cœur des villes branchées qu’est née cette mode. A Paris, Londres, New York, Tokyo ou Milan, vous croisez quantité de ces jeunes à l’allure squelettique flottant presque dans leur slim. Pour William, 19 ans, étudiant dans une art school londonienne, «c’est une question de goût, je préfère me voir maigre». Soit, et quand on lui demande de quoi se compose son repas, ce sont ses copines qui répondent : «Parfois, il mange un chewing-gum dans la journée et ça lui suffit». Ah… combien de temps peut-on tenir à ce régime ? Les filles, à la pointe dans ce domaine, continuent de parler pour lui : «Certains garçons finissent à l’hôpital, c’est comme pour les filles». Selon elles, il existerait une compétition fille/garçon sur ce terrain. Pour Iulia Hasdeu, anthropologue à l’Université de Genève, «si les créateurs de mode parient sur une indifférenciation des corps, c’est bien un nouveau terrain de contestation réciproque qui apparaît ici et qui renforce plutôt la différence de genre».

Les garçons refuseraient-ils de se conformer à la norme virile d’un corps musclé ? Il semble que le diktat de la mode tend à l’inverser puisque les ados fashion transgressent leur genre pour s’approcher de l’idéal corporel féminin : la maigreur. Leur modèle serait plutôt Kate Moss que Didier Cuche. Ceux qui font les tendances et les diffusent, à savoir les gays, désertent les fitness et se mettent à la diète : «On peut mettre toutes les fringues, y compris celles de nos copines», dixit William. Après avoir adopté les codes vestimentaires des homos, les hétéros versent dans l’inappétence pour se donner un genre. De leur propre aveu, ils ne veulent pas passer pour has-been, selon notre étudiant qui assène, radical : «Le muscle, le sport, c’est pour les ringards». Iulia Hasdeu estime pour sa part qu’il y a «davantage de mise en scène des corps et des sexualités et que ce nouveau régime de visibilité expliquerait ce type d’extrémité chez les ados». Et quand on sait que corps svelte et nourriture saine sont l’apanage des nantis, cette posture ne traduit-elle pas une nouvelle forme d’élitisme ?

Nathalie Brochard

l'émiliE - 2012-2016